Après la publication sur le site de la préfecture, lundi 9 août, des conclusions de l’enquête publique concernant le projet de domaine viticole de la SCEA Les vignes de Kerdonis à Bangor et Locmaria, le commissaire enquêteur rendant un avis favorable, l’association La bruyère vagabonde a transmis ce jour à la presse un communiqué.
COMMUNIQUE DE L’ASSOCIATION LA BRUYERE VAGABONDE
Projet d’exploitation viticole sur la côte sauvage de Belle-île: l’association La Bruyère vagabonde dénonce un rapport consternant du commissaire enquêteur à l’issue de l’enquête publique.
Le rapport de Monsieur Alain Guyon, commissaire-enquêteur chargé de conduire l’enquête publique sur le projet d’exploitation viticole à Belle-île-en-Mer est disponible depuis lundi 9 août sur le site internet de la Préfecture du Morbihan. Nous avons lu attentivement ce document de 91 pages, et nous tenons à exprimer notre consternation sur le contenu de ce rapport qui bafoue toutes les règles de neutralité et d’impartialité qui s’attachent à la conduite d’une enquête publique.
Nous tenons en effet à rappeler que le rôle et les missions d’un commissaire enquêteur doivent obéir au « Code d’éthique et de déontologie » de la Compagnie nationale des commissaires enquêteurs, qui stipule, dès son article 1 : « Le commissaire enquêteur remplit son rôle dans l’intérêt général, avec équité, loyauté, intégrité, dignité et impartialité. » Et l’article 3 du même code précise : « Le commissaire enquêteur agit de façon neutre et impartiale et le montre par son comportement. »
Or, nous devons bien constater avec regret que Monsieur Guyot n’a pas respecté ces règles éthiques et déontologiques, tant lors du déroulement de l’enquête publique où il a endossé le rôle de défenseur du projet devant de très nombreux témoins qui l’ont d’ailleurs noté par écrit, que dans ce rapport rédigé sur un ton polémique, particulièrement agressif et virulent à l’égard des citoyens et des associations qui ont émis des avis défavorables au projet.
Ainsi, la neutralité du commissaire enquêteur n’est pas respectée quand, après avoir constaté que le nombre d’avis opposés au projet l’emporte très nettement sur les avis favorables, il estime nécessaire d’ajouter : « Les insulaires n’ont pas osé s’exprimer, 18 dépositions seulement, alors qu’ils sont nombreux à avoir apporté leur soutien aux acteurs locaux ». Et sur quoi se fonde-t-il pour avancer cette appréciation ? Sur un sondage ? Sur des courriers ou e-mails ? Non, sur un témoignage personnel qui n’a rien à faire dans ce type de rapport: « J’ai moi-même reçu des soutiens lors de mes attentes du bateau sur le port », écrit-il (P.64), se mettant ainsi clairement du côté des porteurs du projet.
Ainsi, l’impartialité du commissaire enquêteur n’est pas respectée quand il présente l’origine du projet de cette manière : « Le projet est l’œuvre d’un amoureux de Belle-ile, passionné de viticulture, qui a su convaincre son employeur de créer un vignoble à Belle-île. » (P. 66). Voilà au moins un résident secondaire qui trouve grâce aux yeux du commissaire enquêteur. Car mise à part cette exception, les résidents secondaires sont montrés du doigt et rendus responsables des problèmes auxquels est confrontée l’île, entretenant ainsi l’idée malsaine d’une opposition entre résidents à l’année et secondaires alors que Belle-île a besoin de tous pour vivre.
Ainsi, l’équité du commissaire enquêteur n’est pas respectée quand, après avoir constaté que sur les neuf associations qui ont exprimé un avis dans le cadre de l’enquête publique huit sont opposés ou réservées sur le projet, il consacre pas moins de 11 pages de son rapport à dénigrer ces associations, en particulier la nôtre, accusée d’avoir « orchestré une très importante campagne de presse depuis le 3 août 2018 », alors que « La Bruyère vagabonde » a été créée en novembre 2019 ! Quel manque de sérieux ! (P.66)
Quant aux réponses du Commissaire enquêteur aux très nombreuses inquiétudes exprimées par les citoyens durant cette enquête publique, elles ne s’appuient jamais sur des faits, des expertises ou des expériences avérées, mais sur des sentiments personnels. Exemple flagrant page 83 : « Les 21 dépositions du public pointant la non adaptation de la vigne au territoire insulaire ne me semblent pas crédibles ».
On relèvera aussi les observations approximatives et incohérentes du commissaire enquêteur cherchant à minimiser l’impact environnemental du projet. Exemple page 75 : « Le projet ne remet pas en cause des espèces protégées, tout au plus quelques destructions de sites de nidifications d’oiseaux et déplacements de lézards à 2 raies ». Rien que ça !
Nous devons constater et déplorer que ce rapport ne restitue à aucun moment dans leur objectivité les arguments défavorables au projet, en particulier le risque écologique majeur que constitue le développement d’une exploitation viticole utilisatrice de pesticides dans des espaces naturels protégés par leur classement Natura 2000. Et que dire enfin de la conclusion sur la convivialité qui peut naître autour d’un verre de vin ! Franchement, Belle-île méritait mieux.
Dépourvu de toute approche factuelle des enjeux de fond qu’a pointés le débat public sur ce projet, truffé de sentiments personnels et d’attaques gratuites contre des citoyens et des associations qui ont pris part à cette enquête, ce rapport conclupar un avis favorable perd toute crédibilité. C’est pourquoi nous demandons àMonsieur le Préfet du Morbihan d’écarter ce document du dossier, et de reprendre laprocédure d’enquête publique avec toute la sérénité et le sérieux qu’elle nécessite.
Belle-île le 10 août 2021
Contact: labruyerevagabonde56@gmail.com